Au milieu des soucis apostoliques, saint Paul
exhortait ainsi : « Un temps viendra où l'on ne supportera plus
l'enseignement solide, mais, au gré de leur caprice, les gens iront
chercher une foule de maîtres pour calmer leur démangeaison d'entendre
du nouveau. Ils refuseront d'entendre la Vérité pour se tourner vers des
récits mythologiques » (2 Tm 4, 3-4). Conscients du grand réalisme de
ses prévisions, avec humilité et persévérance vous vous efforcez de
correspondre à ses recommandations : « Proclame la Parole, interviens à
temps et à contretemps avec une grande patience et avec le souci
d'instruire » (2 Tm 4, 2).
(Benoît XVI, discours aux Évêques de France réunis dans l'hémicycle
Sainte-Bernadette, à Lourdes, le dimanche 14 septembre 2008).
"Rien n'est voilé qui ne sera dévoilé, et rien n'est secret qui ne sera
connu" (Jésus, Mt 10, 26).
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« Se tourner vers le pape
est un geste extrême, présentant des risques, une action aux
effets imprévisibles », écrit
Gianluigi NUZZI dans
son livre « Sa Sainteté »[1]
qui a fait tant couler d’encre à propos de l’affaire Vatileaks.
Imaginons
en effet un instant qu’un responsable de communauté religieuse ou
de mouvement ecclésial français prenne une telle initiative par un
courrier adressé au nonce apostolique, et
que son propos soit de critiquer le primat des Gaules, le cardinal
BARBARIN, ou d’émettre des doutes sur la façon dont s’y prend le
cardinal VINGT-TROIS pour gérer le diocèse de Paris. Imaginons que
ces critiques soient développées dans de longs paragraphes
relatifs aux questions religieuses, que ces critiques concernent
également un certain engagement politique, et aboutissent en
conclusion à la nécessité de remplacer l’actuel titulaire de
l’archevêché de Lyon, ou de celui de Paris. Imaginons enfin que le
même responsable religieux recommande nommément au souverain
pontife l’évêque d’un autre diocèse français qu’il juge mieux apte
à remplir la tâche en remplacement de ceux que nous venons de
citer.
Sur
quelle légitimité pourrait se baser ce Supérieur de communauté
pour tenir un tel langage, et adresser ce courrier au nonce pour
qu’il arrive directement entre les mains du pape ? Ne penserait-on
pas qu’il y a dans un tel comportement, non seulement de l’audace,
mais de l’outrecuidance ?
Ne
devrait-on pas s’exclamer : « mais de quoi se mêle-t-il ? ».
C’est
bien pourtant ce qui s’est passé en Italie début mars 2011 quand
Benoît XVI a reçu et visé de sa main un courrier émanant, via Mgr
BERTELLO nonce apostolique en Italie, de Julian CARRON, le
président de la fraternité de Communion et Libération. Dans cette lettre Julian CARRON émettait
des critiques sur la façon dont fonctionnait le plus grand diocèse
de la chrétienté, celui de Milan, et en conclusion il proposait de
nommer à la tête de cet
archevêché prestigieux le cardinal SCOLA
en remplacement du cardinal TETTAMANZI.
Ce fait est attesté par l’annexe publiée dans l’ouvrage
déjà cité, « Sa Sainteté »[2]
. Il mérite qu’on s’y attarde en se demandant en vertu de quelle
autorité, Julian CARRON se sentait fondé à entreprendre une telle
démarche. Pour cela il nous faut tenter de comprendre ce qu’est Communion
et
Libération et quel est le poids de ce mouvement assez
méconnu en France.
A
cette fin nous publions dans ce dossier :
- la traduction d’un article d’Antonio GASPARI remontant à 1995, rédigé aux Etats-Unis pour la communauté laïque dominicaine Martin de Porres et paru sur le site EWTN,
Eternal Word Television Network, qui fournit en ligne un service d’information catholique.
Bien
qu’il soit un peu ancien, il nous a paru retracer de façon
objective la genèse et l’histoire de ce mouvement et donc
contribuer sans parti-pris à sa compréhension.
-
une
interview du fondateur, Don Luigi GIUSSANI, datant
de la même époque
-
une
fiche actualisée tentant de mesurer ce que sont
aujourd’hui les forces et faiblesses de ce « lobby de Dieu »,
ainsi qu’a été surnommé ce mouvement dans un ouvrage de grande
qualité journalistique paru en langue italienne.
-
enfin
un « verbatim » des propos tenus par Don GIUSSANI et Julian
CARRON permettant d’apporter un éclairage sur
l’idéologie qui sous-tend leur action.
La constitution d’un tel dossier a nécessité un travail de traduction de textes écrits en italien ou en anglais. Nous nous sommes efforcés de rester fidèles à la pensée des auteurs. Qu’ils veuillent bien nous excuser, ainsi que les lecteurs, si quelques impropriétés se sont glissées dans cet effort d’adaptation à la langue française.
G.B.